Beg / Steal / Borrow
Tuesday, February 28, 2006
 

Est-ce que les androïdes rêvent de moutons électriques ? 

OK, si je vous disais, là maintenant, que Phillip K.Dick (l’écrivain bande d’ignares) est vivant ? Me prendriez-vous pour un fou ou croiriez-vous que je fais simplement ma pub ?

Pour être plus précis, je peux affirmer qu’il était vivant il y a 6 mois. Après, je ne sais plus.

Et si je vous disais qu’il est vivant et en plus de ça, juste en bas de chez moi ? Est-ce que vous fermeriez ce blog pour passer à autre chose ou est-ce que vous demanderiez des preuves ?


Le voici :

Il est un des rares auteurs, tout genre confondu mais plus spécialement de science-fiction où les ones-shots sont fréquent, à avoir écrit une main plein de romans tout à faits extraordinaires, se complétant, se déchirant, apportant à chaque fois plus d’indices, plus de théories, plus de folies :

Le Maitre du Haut Château
Blade Runner (anciennement Do Androids Dream Of Electric Sheeps)
Ubik
Substance Mort ( A Scanner Darkly)
Valis
La Transmigration de Timothy Archer

On compte dans sa bibliographie des dizaines et des dizaines d’autres romans ainsi que des centaines toutes aussi mal adaptées les unes que les autres par des producteurs pas si illuminés que ça (Minority Report – beurk-, Paycheck –inconcevable de stupidité).

La plus belle légende sur lui est, dans mon tout petit esprit, le fait que durant les années 60, pas encore connu et forcé d’écrire le plus possible pour être payé pour un nombre maximum de feuillets (déjà pas payés énormément), Phillip K.Dick écrivait des romans à la pelle, bourré d’amphétamine, et sitôt fini un livre (à ce titre sans doute Ubik, Le Maître du Haut Château), il enlevait le dernier feuillet de la machine à écrire et en remettait un nouveau derrière, qu’il remplissait immédiatement et qui ferait quelques heures ou jours plus tard, un autre roman, et ainsi de suite.

Ce que j’aime dans son écriture (dans ses meilleurs romans), ce qu’il se soumet juste assez aux règles du genre pour en faire partie. Pas une once de plus que ce qu’il faut. Le reste n’est que lui.

Bénie cette époque où les romans étaient la culture de masse. Où n’importe qui, plutôt doué, pouvait se nourrir et se loger rien qu’en écrivant des bouquins, de genre, d’accord, les uns à la suite des autres, en pensant que jamais ça ne s’arrêterait. Mais il y eu la télévision. Aujourd’hui il me faudrait écrire à la suite les uns des autres des épisodes de Sous Le Soleil et de cette série dont je n’ai même pas envie de me souvenir du nom, avec une ancienne Miss France.

Vous trouvez que c’est la même chose ? Vraiment ? Non. Avant on était libre, avant on pouvait être quelqu’un du moment qu’on envoyait une pile de feuillets valables par la poste. Maintenant il faut faire plaisirs aux petites filles,

Ce n’est pas ce qui a rendu fou Phillip K.Dick, non, il était au-dessus de ça. Parce que oui, j’ai une très mauvaise nouvelle, il est vivant, mais il est fou. Et par fou, j’entends, il a perdu son esprit. La plupart du temps, il parle à des gens invisibles une lange incompréhensible. Il est semblable à Hal Hammond dans Ubik : il voit des choses différentes là où nous voyons tous là même chose. Il n’est pas ici. Son corps, ou une matérialisation grossière censée représentée un clochard, est ici, mais lui, dans sa perception, est autre part. En 1939, ou bien en 1992, un 1992 qui serait notre futur. Ça m’attriste un peu de le voir comme ça. Mais aux dernières nouvelles, il semble que nous soyons obligés d’avoir un corps pour avoir une âme. Les fantômes n’existent pas, pas plus que les esprits malins. A moins qu’il n’est un corps. C’est, je pense, ce qui arrive à Phillip K.Dick. Il est dans le corps d’un clochard qui de plus en plus se met à lui ressembler. Ce corps lui sert d’ancre dans le monde réel, seul porte d’entrée pour le monde des idées, l’esprit, c’est à dire partout : passé, présent, futur, scénarios alternatifs.

Le voici, juste en bas de chez moi :
(insérer photos de P.K Dick)






Maintenant que vous savez qu’il est vivant, vous regretterez de savoir que j’ai perdu sa trace. Il a disparu. Plus dans ma rue, parti pendant que j’étais en vacance à Rome. Pourquoi es-tu parti en vacance idiot ? De mes sources dans les services sociaux de proximité, je sais qu’il a quitté la ville. Impossible de le retrouver. Il est probablement encore dans la région, à un feu rouge, entrain de faire la quête. Peut-on parler de semi-vie, comme dans Ubik ? Peut-être. Peut-être qu’il est mort et se croit encore vivant. Peut-être que son esprit est assez fort pour qu’on y croit aussi. Pour qu’il se matérialise, en 2005, dans ma rue, mais qu’il croit être en Californie dans les années 60 ou n’importe quand. Je n’y avais jamais pensé, mais il était toujours à côté de ce feu de circulation. Vert. Orange. Rouge. Le Bardho Todhol, le livre des morts tibétains. Le mort en semi-vie attend sa réincarnation, ou la fin de son cycle. Une lumière rouge et fumeuse représente les couples forniquant et attire le mort. Le rouge du feu de circulation.
 
Saturday, February 25, 2006
 

Ecrits vains 

La règle est la suivante : un texte peu importe sa longueur, qui reprend le texte d’une chanson, et qui doit tout sauf lui ressembler, pour s’occuper les soirs d’hiver un peu solitaires.

Fuck Forever – Babyshambles



« Fuck Forever ! !», elle commença par dire et soudain, de part sa voix éraillée, ses gestes agressifs et la couleur qu’avaient pris ses joues, elle perdit toute l’affection que j’avais pu développer pour elle.
Elle dut le remarquer sur mon visage, à moins que ce ne soit mes yeux, dérivant d’elle vers le comptoir du bar dont le bois s’effilochait sous mes doigts, qui donnèrent l’alerte, et quelques secondes, plus tard, se rasseyant sur le tabouret, revenant à ma hauteur, se penchant même pour capter mon regard, elle rajouta : « If you don’t mind… » avec cette voix ridiculement fragile qui m’avait d’abord séduit, juste avant que je ne me rende compte qu’elle sonnait plus fausse que fragile.
Elle restait là, avec ses grands yeux tout ronds, à essayer de capter les miens, si près de mon visage que je pouvais sentir son souffle, si près de mon visage que je l’aurai embrassée sans cette terrible odeur de bière. Elle attendait ma réponse.
« It’s one and the same » fut cette réponse, maladroite, avec mon terrible accent français qui ressort à chaque fois (à chaque fois !) que je suis gêné ou que j’essaie de paraître sûr de moi. « Don’t try to be gentle because it’s one and the same » finit quand même par complètement sortir hors de ma bouche lors de ma deuxième tentative pour réussir à achever ma phrase sans m’effondrer en pleurant.
« Oh, it’s one and the same ? It’s not supposed to be the same » assura-t-elle sans bouger, sans rien changer à sa voix si ce n’est une pointe de déception marquée par le point d’interrogation. Elle garda la bouche ouverte, comme pour appuyer cette expression encore plus. Je crus qu’elle aussi allait pleurer. Sa lèvre inférieure sursauta et frôla sa lèvre supérieure, une faiblesse, et à cet instant je m’attendais vraiment à ce qu’elle pleure. Sauf qu’elle ne pleura pas, que son souffle devint plus chaud, que je compris que ce n’était qu’un renvoi provoqué par la bière. De déceptions en déceptions, elle m’avait conduit jusqu’ici et j’ignorais si un jour je pourrai échapper à cette situation ou bien si j’étais condamné à la voir se répéter encore et encore jusqu’à la fin des temps. Je me suis dit : qu’ai-je fait pour être puni ainsi. Bien sûr, j’avais quelques réponses très plausibles, que je préférais immédiatement oublier, trop occupé à étouffer sous la douleur de la voir à nouveau s’agiter.
« But Yeah. Yeah after all, what the use between death and glory ? Me, I can’t tell between death and glory. Do you ? Neither New Labour and Tory. »
Personne, pas une seule âme, dans tous le pub, ne sembla s’inquiéter de ce brusque haussement de ton. Bien sûr, il était tard dans la nuit et bien sûr, je suppose que l’on aurait pu dire qu’il était à moitié vide. Mais pour moi, dans cette situation, craignant qu’à tout moment quelqu’un ne vienne pour nous faire sortir ou pire, pour appeler la police, ce sordide pub de quartier, planté au milieu de Manchester, fréquenté uniquement par des habitués et des riverains, saouls, mais dignes, semblait un coupe gorge dans lequel, en aucun cas, je n’aurai osé sortir un mot de trop de ma bouche, remuer sur ma chaise ou bien regarder, même par inadvertance, un seul des quarantenaires, fatigués, déçus par leurs propres espoirs, venus dépenser les restes d’une paie à peine capable de rivaliser avec l’assurance chômage dans la seule chose qui marche à chaque coup : l’alcool.
« Or Purgatory and no happy families » elle trouva bon d’ajouter, oubliant toute question de sens, oubliant peut-être même de quoi elle parlait, oubliant, je l’espère, pour qu’enfin elle se calme, ce que je lui avais fait et ce que je lui avait dit.
Toujours pas de réaction autour de nous. Elle, visiblement dérangée, avait mis un genou sur le bar et se servait désormais en bière directement à la pompe accrochée derrière la partie supérieure du bar. Le barman ne se retournait même pas, il se contentait d’essuyer des verres, près d’un lavabo, ignorant ou feignant d’ignorer les bruits qui ressortaient de sa conduite folle. Je pris un moment, une seconde en réalité, pour me demander si nous n’étions pas mort tous les deux dans cet accident qui avait causé notre rencontre, un quart d’heure plus tôt, ou était-ce une heure, devant ce bar, moi à moto, elle traversant la rue sans regarder, et la collision qui s’en suivit m’aveugla, me retourna, et m’expulsa sur le trottoir, à l’entrée même de ce pub, pendant qu’elle, ne criant même pas, agissant à peine plus bizarrement qu’une fille saoule, essayait de s’extirper de sous la roue, tournant encore, de ma moto. Je comprenais à peine qu’elle devait être une habituée du bar, qu’elle devait en sortir au moment où l’accident a eu lieu, puisqu’elle était saoul juste devant, quand un bruit effrayant vint avorter ma réflexion.
Avec son mollet traînant à sa suite sur le comptoir du bar, elle venait de renverser mon verre, vide, qui avait rebondi sur ma jambe avant de s’éclater par terre, dispersant des piques pointus de glace sur le sol, l’un transperçant le bout de ma chaussure gauche, l’autre se plantant dans ma jambe, quelques millimètres au-dessus de la chaussette. Elle rit, employant tous les moyens pour descendre du comptoir à reculons sans renverser d’autres choses ni me donner de coup de pieds. Je n’avais même pas vraiment mal. Par inadvertance, je regardais ses fesses. On pouvait dire qu’elle étais plutôt jolie. Si l’on avait du faire un panel, d’une centaine d’hommes, venant de tous les pays, de tous les horizons, de tous les âges et de tous les métiers, il n’aurait pas été étonnant qu’un peu plus de la moitié de ce panel la trouve à son goût. Une forte odeur d’eau de javel emplit mes narines d’un seul coup, alors qu’elle avait presque retrouvé sa place sur le tabouret, et je m’attendis à ce que le barman arrive avec de quoi laver le sol jusqu’à ce que je jette un coup d’œil derrière moi et que je le vois immobile, imperturbable.
Elle se pencha vers moi et me demanda si tout allait bien. Je répondis que oui, malheureusement trop tard, elle avait déjà vu les morceaux de verres plantés en moi. Elle devint blême et poussa un cri d’effroi qu’elle arriva pourtant, une première, à contenir en elle. Immédiatement, elle se plia en deux et toucha de ses doigts grossiers le morceau qui était dans ma jambe, provoquant des picotements désagréables jusque dans le haut de mon dos. Violemment, je tirais sur la masse de ses cheveux châtains jusqu’à remonter son visage, non sans qu’avec sa main toujours serrée autour de la paroi fragile et brisée du morceau de verre, elle l’arrache de ma jambe.
Droit dans les yeux, je lui dit : « Stop It ! That’s enough ! Everybody is looking at us », ce qui étais faux, mais je cru bon de lui éviter un discours sur ma paranoïa dans mon anglais qui sous le coup de la tension commençait doucement à me faire défaut. Elle ne me fit pas mal quand elle me retira le morceau de verre. Au contraire, je ressentis une impression de soulagement et quelques secondes plus tard, je me sentais déjà mieux et regrettais la violence avec laquelle je venais de la traiter.
« What ? Them ? They don’t care. They know me. You are not their type, believe me. But they have a way. A way to make you pay, you know, and to make you toe the line. I would’nt like it if I were you. I don’t like it. »
Ma main relâcha doucement ses cheveux et elle ne semblait ne m’en vouloir pour rien. Elle me regardait, droit dans les yeux, et retournait la position de force en sa faveur. Elle avança ses lèvres et les fit entrer en contact avec les miennes. Je ne réagis pas. Elle prit ça pour une incitation et fit entrer sa langue dans ma bouche. Je me contentais de fermer les yeux. Le baiser dura exactement le temps pour moi de me demander si ce n’était pas une pute. Après tout, elle en avait les manières et parlait avec ce même mélange de dureté et de fausse gentillesse. Rien ne semblait l’atteindre. Son visage et ses vêtements étaient un peu sale. En sa faveur, je l’avais tout de même renversée et projetée dans le caniveau.
En même temps qu’elle m’embrassait, elle tendit son bras vers mon pied et d’un coup sec, elle retira le dernier bout de verre de ma chaussure en même temps qu’elle priva mes lèvres des siennes.
« See, it was painless ! I know you, you know. You think you’re so clever, but you’re not very wise. »
Le barman, enfin soustrait à ses taches ménagères, fit sonner la cloche de fermeture, ce qui la rendit muette. Elle avait l’air déçue. Je déposais sur le comptoir de quoi payer pour nos verres à tous les deux et voulut partir en trombe, la laisser sur place, ne pas lui donner le temps de se rendre compte de ma disparition. Je voulais qu’elle soit surprise. C’était sans compter sur ma jambe qui décida de ne pas me suivre. Elle rit à nouveau devant mes gestes inélégant pour m’empêcher de tomber à la renverse. Je m’agrippais d’abord à mon tabouret mais, par essence encore moins stable que moi, il voulut me suivre à terre, alors je fis l’effort de maintenir mon équilibre sur une jambe jusqu’à ce que j’arrive à toucher le comptoir. C’est là que je sentis sa main, fraîche, douce, minuscule mais solide, qui prit la mienne et me remit d’aplomb. Je la dévisageais, saisi par cette transformation des sensations qu’elle m’avait procuré. Elle proposa de m’escorter jusqu’à la porte, enroulant déjà son bras autour de mon cou. Je ne trouvais pas les mots pour refuser. Nous étions les derniers à sortir. Elle me guida encore quelques mètres sur le trottoir tandis que la lourde porte se refermait derrière nous dans un claquement hâtif.
Je commençais à essayer de sortir de son étreinte quand elle dit quelque chose comme « I severed my ties » avec une voix d’outre-tombe, mangeant tous les mots comme si elle en avait besoin pour vivre, comme si elle avait besoin de leur énergie pour tenir debout. C’est à ce moment-là qu’elle, la personne chargé de m’aider à marcher, s’effondra à terre, ses jambes lâchant sous le poids de son corps. J’eus à peine la force d’amortir sa chute. Elle reprit immédiatement connaissance et s’adressant à moi de telle façon à ce que je sente à nouveau les reflux de bière, me remercia. Je voulais l’emmener dans un hôpital. Tant pis pour les conséquences. Elle refusa. Alors au moins je la ramènerai chez elle. Elle dit qu’elle habitait trop loin. Elle me demanda où j’habitais. Dans un élan maladroit de franchise causée par la proximités de nos maux, je lui avoua que j’habitais à un peu plus de cinq minutes de là. Elle voulut que je l’emmène chez moi. Juste le temps qu’elle se dégrise un peu, elle dit. Juste le temps de manger un petit morceau, elle dit.
Brinquebalant comme un vieux couple dans la nuit, je la ramenais chez moi. Sur le chemin, plutôt silencieux, elle déclara simplement « See, that’s a happy ending. Happy endings, they never bored me and they still don’t bore me ». Je préférais rester muet. Peut-être que je ne pouvais pas parler.
Arrivé chez moi, pour la première fois je ne regrettais plus que ma chambre d’étudiant soit au rez de chaussé. J’ouvris la porte du hall avec douceur, elle entra la première, je la suivis. Je mis quelque temps à trouver ma clé car je ne voulais pas allumer la lumière, sachant que la raie de lumière qui filtrait à travers les portes mal isolées des appartements réveillerait mes voisins comme elle me réveillait si souvent.
Elle me déposa sur le lit. Elle releva le bas de mon pantalon. Miraculeusement, elle semblait terriblement maître de ses mouvements. Elle regarda la plaie et me rassura : ce n’était rien. Elle souleva le bas de son t-shirt et révéla du milieu de son ventre jusqu’au milieu de son dos, une énorme contusion rouge. Je reconnus le pneu et le garde-boue de ma moto. Elle cria « Oh my god ! » quand elle vu l’étendu des dégâts. Je ne pus dire autre chose que : je suis désolé. En français. Elle me fixa avec assistance, comme si elle avait compris, comme si cela faisait parti de son vocabulaire français. Elle rajouta tout de même qu’elle était peut-être entrain de mourir d’une hémorragie interne. Elle retira complètement son t-shirt, l’étendu rouge montait jusqu’à cinq centimètre en dessous de son soutien-gorge, puis elle retira son jean et enfin sa culotte. L’étendue rouge allait jusqu’à ses pieds. Elle rit de frayeur en découvrant l’emprise qu’avait eu ma moto sur elle.
Elle était-là, devant moi, nue, une inconnue, une victime, sans pudeur, sans retenue, elle partageait ses blessures avec les miennes et prit ma main fermement dans la sienne pour que je touche la texture de l’étendu rouge. Elle était chaude et nivelée en plein de petits traits d’un millimètres ou deux. Ma main sur sa cuisse, descendant et remontant sous sa propre pression, elle gardait les jambes serrés pour me faire croire qu’elle essayait de me cacher son sexe. Elle me demanda où il y avait un miroir. Dans la salle de bain, lui répondis-je. Elle voulait voir ça. Elle voulait voir dans son entier ce que je lui avait fait.
Elle me dit « Don’t move, I’m gonna come back » et partit en petites enjambées, toute enjouée, me tournant le dos, ses fesses remuant avec ses pas. Arrivée devant la salle de bain, une simple pièce, séparée par une porte blanche, à l’autre de bout de ma chambre/salon, elle me regarda en marchant, tournant juste la tête vers moi et me dit « See, you don’t move. I’m stuck forever. I’m stuck in your mind. » Elle répéta « Your Mind. Your Mind » et disparut dans la salle de bain. « Your Mind. Your mind Your mind » elle continuait avec un rythme aussi précis qu'une sirène d’ambulance.
 
Thursday, February 23, 2006
 

My Year Of Love (final) 

1. Garden State – Zach Braff



Comment juge-t-on un film ? Il y a deux façons de voir qui je crois, ne se chevauchent pas. La première, pour les films anciens, est de voir, revoir, revoir, analyser, découper et décrypter un film pour en tirer le sens profond, quand il existe. Forcément, c’est la plus noble façon et elle s’exerce précisément sur les films nobles : films de grands maîtres, films en noir et blanc, films matures tout simplement, de plus de quatre ou cinq ans. L’autre façon, c’est la façon immédiate, celle qui s’applique quand on va voir un nouveau film, au cinéma. Le meilleur test, c’est de voir si les jours suivant le projection, on se souvient encore de scènes, d’instants, de musique du film. C’est simple : on fait marcher le feeling, les souvenirs, la façon dont le film intègre notre mode de pensée. En gros, il suffit de se poser deux questions : où en étais-je avant de rentrer dans le cinéma et où en suis-je maintenant que je viens d’en sortir ? J’ai la prétention de penser que les données de la seconde méthode se recoupent avec celles de la première.
Pour Garden State, c’est simple : moins de cinq minutes après la dernière lettre du générique, je fouillais le bac du Virgin Megastore à la recherche de la bande annonce. Le lendemain, je décorais mon nouveau carnet Moleskine aux couleurs du film. Deux mois plus tard quand il repassait au cinéma, je le revoyais deux fois. Trois ou quatre mois après, un ami me ramenait le dvd des Etats-Unis. Voilà ce qu’est Garden State. Ce ne serait même pas la peine d’en rajouter. Bizarrement, je réalise que j’ai du mal à chroniquer ce film, tout comme j’ai eu du mal à chroniquer pas mal de films récemment, à part le Cash peut-être.
L’histoire est dans l’air du temps (rien qu’à voir Lonesome Jim et Rencontre à Gabrieltown) mais Garden State est bel et bien le premier à l’avoir raconté (sorti en 2005 en France mais un ou deux ans avant aux USA. Andrew Largeman, inspirant acteur, la vingtaine tassée, est parti tenter sa chance à Hollywood. Résultat : il est serveur dans un restaurant vietnamien. Le jour où sa mère meurt, il doit retourner dans son New Jersey natal, retrouvé les amis qu’il avait oublié, laissant ses calmants, ses peurs et ses déceptions en Californie. A Jersey (surnom : Garden State) il tentera de faire la paix avec son père, il tombera amoureux d’une fille prénommée Samantha et hésitera entre fuir ses anciens amis ou les prendre dans ses bras. En fait, il n’y a pas vraiment d’histoire dans le film : le film n’est que la capture d’un moment, mais il en sort parce que toutes les histoires dont nous avons besoin se sont déroulé hors du temps du film et s’expriment, transpirent, dans chaque plan. La simple vision de l’appartement d’Andrew à Hollywood et nous connaissons tout de sa vie et de sa solitude, un seul plan de lui ouvrit son armoire à pharmacie, ce qui sépare les deux pans de la glace qui reflète son visage, nous indique son état actuel, son état de toujours, la répétition habituelle des gestes. Une simple photo de sa mère en fauteuil roulant, posée sur son cercueil, nous montre le mélange d’empathie et de dégoût que pouvaient ressentir Andrew envers elle et nous prépare à des révélations ultérieures, c’est Andrew qui est la cause de sa paralysie et c’est pour ça qu’il est sous médicament et qu’il a quitté le New Jersey. Un simple regard de l’un de ses amis, fossoyeur, alors qu’il retire des bijoux d’un cadavre, les deux pieds dans le cercueil et l’on comprend en même temps qu’Andrew qu’il a fait la même chose à sa mère, ce qui introduit la dernière partie du film, la quête pour récupérer les bijoux qui les mènerait jusqu’au bout du monde, à côté de chez eux. Enfin, car on ne pourrait les faire tous, un seul rire sortant de la bouche de Samantha (Natalie Portman) et l’on sent là que l’on vient de faire la rencontre la plus importante de notre vie, un seul regard aux autocollants sur son énorme casque, une seule seconde de la musique des Shins qu’elle écoute et l’on comprend qu’on ne pourrait lui échapper, qu’on la rencontrera dans la ville au moins deux fois par jour, qu’à chaque fois les mêmes regards s’échangeront, alors autant se lancer tout de suite. Un petit dernier ? Un seul tour dans la maison de Samantha, des hamsters du rez de chaussé au cimetière des animaux dans le jardin, en passant par sa chambre et sa collection énorme de vinyles, et l’on sait exactement qui elle est, comment elle a grandi, et ce qu’elle veut.



La plupart des avis sur ce film disent que c’est un film maladroit, que c’est un petit premier film et que ça se voit. Dans ces moments, j’ai toujours du mal à croire que je suis vivant, actuellement, dans ce monde-ci. De toute l’année, mis à part Life Aquatic et Locataire, je n’ai vu de film plus maîtrisé et abouti. Chaque simple décor est travaillé, il parle et nous en apprend plus que ce qu’aucun fil narratif n’aurait pu le faire, chaque chanson de la BO est à sa place au bon moment, chaque plan à son ressort comique (la vue aérienne pendant que Sam et Andrew essaie d’éviter la flèche qui retombe, l’arrivée de Kenny qu’on ne voit pas et qu’on prend pour un policier violent, etc.) Est-ce que Last Days peut en dire autant ? Je ne crois pas et pourtant j’adore Van Sant, mais en 2005, Zach Braff en terme de cinéma a été plus fort que Van Sant. Et vachement moins prétentieux en plus.
Garden State est une comédie et bien plus que cela. C’est un apprentissage, celui de la vie, en quelques chemins et erreurs. Andrew Largeman va d’Hollywood, où il est un acteur raté, au New Jersey où il est dans le désordre : un fils, un ami, un danger, un malade, un football attardé, un gars sympa. Mais le plus important, c’est qu’il sort de sa route toute tracée. Là où il prenait toujours les avions, où il revenait chez lui parce qu’il y était obligé, où il prenait sa voiture par telle habitude qu’il oubliait d’enlever la pompe à essence de la réserve de carburant, à la fin du film il laisse tomber le vol qu’il devait prendre et qu’il avait prévu depuis son arrivée, pour rester avec Samantha. Il oublie tout ce pourquoi il s’était programmer, parce qu’il s’était programmer pour l’échec. C’est ce que signifie son rêve au départ : dans un avion, tout le monde sauf lui est effrayé par le crash que se prépare. Ils savent tous qu’ils vont mourir et il est le seul à ne rien faire pour l’empêcher, aussi dérisoire ces gestes soient-ils. A la fin, dans l’avion, il est le seul à se dire qu’un crash se prépare. Il sait. Il comprends. Il sort. Et nous offre une scène qui peut rivaliser avec celle du requin jaguar dans Life Aquatic. Où en étais-je en sortant du film ? J’avais fait un rêve, qui m’avertissait de ci, de ça, et en sortant de la salle, je sortais en courant de l’avion, et en cherchant de les rues d’une ville inconnue, j’espérais trouver Samantha.


Bande annonce : par ici
 
 

My Year Of Love (partie 4) 

2. Match Point - Woody Allen

Pour Woody Allen c’est une première : il fait un film qui se passe entièrement en dehors des Etats-Unis, bouleversant toute la bible de ses personnages et de ces situations. Et son cinéma en est transformé, comme jamais on ne l’aurait cru. C’est sa deuxième tragédie entièrement réussi, et là seule qui respecte vraiment les règles du genre. Par le thème du tennis, il évoque « L’inconnu du Nord Express », autre histoire de dilemme entre deux vies, raison et passion, qui tourne mal, et dont la photographie semble avoir été simplement colorisée pour les besoins de Match Point.
Chris Wilton est un ancien tennisman irlandais qui a besoin de se reconvertir. Par le biais de son boulot de prof de tennis, il devient l’ami d’un fils de bonne famille qui partage son amour pour l’opéra et lui présente sa sœur avec laquelle il va très vite sortir. Tout semble sur des rails pour lui : il obtient un boulot dans la société de cette bonne famille anglaise, va se marier avec la fille de la famille et déménager avec elle dans un énorme appartement payé par son beau-père. Si seulement il n’y avait pas eu cette rencontre. Un simple instant, précédé par un bruit entêtant de balle de ping pong rebondissant sur le plastique d’une table qui l’a immédiatement arrêté et un regard sur une fille splendide dont il tombe amoureux : Nola Rice, la petite amie et futur femme de son beau-frère.
Que choisira-t-il ? L’arrivisme ou la passion ?



C’est tout le thème du film, qui peut toucher n’importe qui mais s’applique particulièrement, de manière symbolique, à la vie des jeunes artistes, comme Woody l’a lui-même été.
Match Point est une tragédie au vrai sens du terme parce que la seule force, la seule contrainte qui s’oppose au chemin de Chris Wilton, c’est lui-même : son avenir est tout tracé avec sa belle femme, avec tout ce que cela comporte, femme attendrissante, famille unie et généreuse, travail de luxe, et dont il a terriblement envie, mais en lui-même, quelque chose résiste, un reliquat du passé, de l’adolescent qu’il a pu être, des rêves qu’il a pu embrasser. La première fois qu’il la voit, Nola joue au ping pong, version de table du tennis auquel il excelle et qui est sa plus grande passion, lui qui aurait pu devenir un artiste de la raquette comme le lui dit une vieille connaissance qu’il croise aux hasards du Londres. Immédiatement, Nola est identifiée avec le tennis, mais le tennis dans une expression inférieure, le ping pong, tout comme Nola est inférieure à la société londonienne parce qu’elle est américaine, qui plus est avec des penchants pour l’alcoolisme et la dépression. Déjà, pour Chris, sous la pression de sa volonté de réussite et de la société, le tennis, comme Nola, sont une passion inférieure, comme l’alcool, le jeux, ou la drogue, peut-être sa seule passion, mais une passion à laquelle il ne peux céder sans être mis au rebut de la société.



Si Chris lit du Dostoevski, c’est pour un petit clin d’œil multiple ( Crimes et Chatiments, Le Joueur, autant de titres qui pourrait aller très bien à Match Point), peut-être l’élément le plus drôle du film, mais le moins visible. Woody retient d’ailleurs tout durant le film, à l’inverse de Crimes et Délits qui gardait une touche d’humour à travers son personnage, et le manque ne se fait pas sentir (contrairement à Une Autre Femme ou Intérieurs), peut-être à cause du dépaysement de Londres qui nous fait oublier tout ce que Woody a pu faire auparavant. Il n’y a que deux autres touches d’humour : l’accent du vendeur d’appartement et le wook qu’il offre gratuitement au nouveau locateur (je suis le seul à avoir ri …) et au travers des deux inspecteurs (dont Ewen Bremmer) qui enquêtent sur le meurtre de Nola à la fin et sont abasourdi par l’absurdité de l’intrigue criminelle, clin d’œil appuyé avec le spectateur qui évoque moins l’humour habituel de Woody qu’une volonté délibéré de jouer du goût du pathétique, fréquent dans la tragédie, de cette situation.
L’opéra, présent tout le long du film et qui forme une splendide BO, est un autre élément qui vient surligner l’affiliation du film avec la tragédie. Les premières notes du film font du générique, à l’inverse de celui, horrible, de Melinda and Melinda, l’un des plus jouissifs de Woody, augurant extrêmement bien du film. Et quand Chris monte les escaliers pour aller tuer Nola et sa voisine, fusil à la main, s’est un entrelacs de voix masculines, tragiques, qui se perdent, se retrouvent, créent une cacophonie qui reproduit celle de son esprit et évoque une montée au ciel qui ne s’achève que quand il tue et glisse par terre, projeté par sa propre faiblesse et par le choc du tir, déchéance de celui qui voulait être ange, entrer au paradis sur terre, l’argent et la reconnaissance.
Il n’est pas possible d’évoquer le film sans finir par l’introduction au film, voix de Chris Wilton (Jonathan Ryes-Myer) à travers laquelle on reconnaît Woody, introduisant son film, dictant sa plus grande réussite, l’absence de moral du film. C’est peut-être ce qui fait la réussite du film et qui le place en avant de sa filmographie.

Bande annonce: par ici
 
 

My year of love (partie 3) 

3. Life Aquatic With Steve Zissou – Wes Andersen



Y avait-il une scène plus émouvante, qui touchait plus à la profondeur d’un homme qu’on appellera communément personnage, dans toute la filmographie mondiale de 2005, que celle, à la fin de La Vie Aquatique, où Steve Zissou, héros has been de la mer, est face, entouré de tous ses amis et sonorisé par Sigur Ros, au requin jaguar, créature énorme et inconnue, sa découverte, celle-là même qui a causé la mort de son meilleur ami et de son fils ? C’était l’expérience cinématographique à voir cette année. Eventuellement, ce requin est farfelu, éventuellement, il n’a jamais tué personne, éventuellement, c’est l’invention de Zissou, un mensonge pour relancer sa carrière, éventuellement, Ned est vivant. Pourtant, le requin jaguar est bien là, en face de lui. Rarement cette année on aura plus touché à l’essence du cinéma. Le mensonge de Zissou, le prétexte même du film, lui permet de revivre, de s’accepter, de comprendre quelle est sa famille et effectivement, de relancer sa carrière. Regardez bien la toute dernière image du film, quand la Team Zissou monte sur le bateau après avoir couru au son de Queen Bitch (Bowie), sur le pont supérieur du bateau, qui est là, dont on ne voit que l’ombre, à fumer une pipe ? Ned Zissou, et je suis le seul à l’avoir vu je crois, parce que 3 fois de suite, j’ai du le montrer aux gens qui m’accompagnaient dans les différents cinéma. D’un point de vue rationnel, on peut dire que c’est l’esprit de Ned, mort, qui veille sur son père et le regarde enfin retrouver sa voie. Mais d’un point d’un vue cinématographique, Wes Anderson nous fait un commentaire sur la création : dans chaque histoire, racontée dans un documentaire, par une mère au bord du lit de son enfant, dans un film de cinéma, la création de beauté nécessite le mensonge, elle nécessite de passer outre les limites du monde rationnel et conventionnel qui nous entoure pour s’échapper dans le monde du mensonge que l’on accepte, du mensonge positif, celui que l’on sait faux mais que l’on accepte, le monde du rêve. On se rapproche de Big Fish, autre histoire de poisson, mais raconté totalement différent.



La Vie Aquatique c’est l’histoire un brin rock’n’roll d’un vieux Cousteau américain en perte de vitesse qui décide de se lancer à la poursuite d’un poisson fantoche qui aurait tué son meilleur ami dans la première partie d’un documentaire raté et bidonné. Dans sa quête, il va rencontrer pour la première son fils de 30 ans, une journaliste qui refusera toutes ses avances et finalement, le poisson qu’il croyait avoir fantasmé. Sans contexte, c’est la comédie de l’année, une comédie comme on les aime, pas vraiment loufoque, plutôt subtile qui se révèle au fur et à mesure des visions. Car oui, c’est un film à voir et revoir pour mieux, dans un premier temps le comprendre, mais surtout l’apprécier, entrer dans son univers. Univers entier qu’à crée Wes Anderson, d’îles en bateaux, de plages en fond marins, et je mets quiconque au défi de ne pas sentir l’odeur salée de la mer, de ne pas rire et exploser de comble quand Zissou s’énerve et tue les pirates au son de Search And Destroy ( Stooges), de ne pas simplement, avoir envie de retrouver tout ça, après trois ou quatre visions. A l’inverse de Walk The Line, film pop corn mais bien, à ne voir qu’une fois, La Vie Aquatique est LE film de l’année à posséder en dvd, car il est comme une série, totalement complète, que l’on peut voir et revoir en s’attachant un peu plus aux personnages chaque fois. Le film n’a besoin de rien de plus : un lecteur de dvd, une petite télé, un globe terrestre, une propension au mensonge. C’est parti, embarquez, respirez, courez, vivez, chantez Bowie en portugais avec Seu Jorge, vous aimerez ça plus que jamais vous ne l’aurez cru, jamais vous n’aurez imaginé être le fils de Steve Zissou, de Cousteau, et pourtant c’est si bon. Le film le plus sous-estimé de l’année, justement parce qu’il marche avec le temps.
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Wednesday, February 22, 2006
 

My year of love (partie 2) 

6. My Summer Of Love – Pavel Pawlikovski



Un petit film, sympa, sans prétention aucune, comparé à ceux qui le précédent dans le top, et c’est grâce à cela qu’il s’en sort et finit devant les autres. Une simple histoire d’amour ou d’amitié entre deux jeunes filles, un été, à la campagne, baignée par Goldfrapp. Que demander de plus ? Une photo intéressante parce que plutôt rare, pas tape à l’œil, faisant la part belle aux ombres et au suggéré. Deux bonnes actrices qui ne tirent jamais l’écran à elles. Une réalisation discrète mais maîtrisée d’un bout à l’autre par le montage. Un film court, qui coupe juste au bon moment. Peut-être moins à dire, mais n’est-ce pas là l’apanage d’un bon film ? Tout est sur la pellicule. Un mauvais film, on a à critiquer. Un excellent film, on a à analyser. Un bon film, ça se voit. My Summer Of Love n’est pas en demi-teinte, il va au bout de son mécanisme, montre tout ce qu’il peut montrer et sait arrêter avant de tomber à plat. On repense à ces magnifiques scènes baignées par Goldfrapp et Ennio Morricone, dans le noir de la maison, quand Tamsin (la brune) regarde à travers la fenêtre. Quelque chose se passe. On ne comprends pas quoi. Même son mensonge à propos de sa famille n’est pas téléphoné et ne révèle sa vraie nature qu’au fur et à mesure de suggestions. Il n’y a aucune prétention. Les deux actrices s’en sortent honorablement, elles en ont fait juste assez, alors que le son qu’elles jouent pas vraiment, elles se contentent d’être elles-mêmes tout en allant un tout petit peu au-dessus, ce léger cran qui fait que la magie prend entres elles, que quand elle se regarde ou s’ignore, on sent leur relation exister, naître ou refluer. En quelques plans simples, le réalisateur pose sa griffe en posant l’atmosphère, proche de Virgin Suicide mais en remplaçant la glace par le feu. Mona tombe de cheval, le cadre se renverse et on entre dans le film, comme une hallucination, un rêve fiévreux, mais un rêve quand même. Désormais, nous serons Tamsin. Plus moyen d’y échapper. C’est beau, simple et discret. Ça reste quelque part dans notre esprit, comme une expérience hors du corps : « pendant une heure et demie, j’ai été une fille, une adolescente qui passait du temps avec sa copine. Bon je dirai pas que j’ai pas reluquer les seins de sa copine justement, mais je sais pas, c’était pas pareil. Elle me plaisait grave, mais c’était pas pareil. Plus doux, plus lent. »
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5. Dig ! – Ondi Tominer



Un documentaire. Le seul de la liste, à moins qu’on considère que Dig soit un documentaire aussi faux que La Vie Aquatique (ce qui est tout à fait possible). Dig parle de deux groupes, un connu du milieu, les Dandy Warhols, l’autre connu d’un millier de personnes, le Brian Jonestown Massacre. Au début, ces deux groupes étaient des égaux. Ils ont émergé de la scène rock de Californie à peu près en même temps et c’est parce qu’ils étaient amis que le documentaire se penche sur leurs deux cas. Evidemment, au fil des années, et c’est ce que raconte le film, sous le coup des égos et de l’industrie, les groupes vont se détester et se déchirer, pendant que les Dandy Warhols accèdent au succès en polissant leur musique et leur image et que le Brian Jonestown Massacre suit son chemin de vagabond.
Qu’en est-il du cinéma ? Pas grand chose. Ce n’est pas un documentaire exceptionnel. Il se concentre sur les sujets les plus ennuyeux : querelles de groupes, batailles sur scène ? Ce n’est même pas cinématographique et c’est à peine drôle (drôle la première fois, dégouttant la deuxième, déchirant la troisième, au moins on a l’impression de progresser, de s’attacher aux groupes et aux personnages). Non là où le film touche à la beauté, ce sont dans les moments de beauté et de liberté où les groupes font les show et où le montage fait la magie : le Brian Jonestown Massacre jouant Ballad of Jim Jones dans le métro, séduisant absolument TOUT le monde, même un vieux fan de Dylan devenu businessman ; Anton Newcomb (du Brian Jonestown) et Courtney (des Dandy) dans le désert son de Nevertheless ; Anton à la fin du film, seul, déchiré, et heureux, chantant The Gospel According to Newcomb ; ce même Anton, seul dans un studio, enregistrant, presque en direct, sous nos yeux, tous les instruments de The Devil May Care (Mom and Dad don’t), passant du squelette au corps tout entier. C’est évidemment parce qu’il contient une bonne poignée de ces moments et parce qu’il met le focus sur une scène peu connue qu’il échappe à la norme des docu rock télévisuel et obtient très favorablement l’apport de l’écran cinéma. Malgré tout, c’est un film à voir dans n’importe quelles conditions sauf les plus sérieuses : personnellement, je l’ai vu sur un tout petit écran, dans une salle dont les lumières ne voulaient pas s’éteindre, deux se
Et qu’en est-il de la musique ? Evidemment, c’est l’atout majeur du film. Là où les rockumentaires habituels nous laissent écouter quelques démos, assister à trente secondes d’enregistrement et diffusent en boucle les gros tubes, celui-ci met tout à nu, et c’est gratuit : trentaine de chansons, enregistrements, concerts, répétition de jardin, chanson impromptue et acoustiques. Et quelles chansons ! ! Soyons franc : 90% des spectateurs ne connaissaient pas le Brian Jonestown Massacre, ou alors comme un simple nom, croisé furtivement sur Soulseek. Et pourtant … C’est peut-être le meilleur groupe inconnu du monde. En ce sens, oui, c’est le Velvet Underground post-moderne. Une bonne dizaines d’albums, tous aussi bon les uns que les autres, téléchargeables gratuitement sur leur site interne, où se côtoient allégrement l’originalité et les meilleurs groupes du monde (Velvet, Beatles et Stones réunis sur Straight up and down, Donovan –Hurdy Gurdy Man -sur The Devil May Care). Ceux qui connaissaient cet héritage se marrent et se délectent des chansons plus inédites, et ceux qui ignoraient tout découvrent l’ensemble, en une seul dose, une seule chanson. Quant aux Dandy Warhols, ne leur jetont pas la pierre, ils ont vraiment une poignée de bonnes chansons, individuellement meilleures que celles du Brian Jonestown Massacre, mais l’ensemble de la discographie de ces derniers les écrasent largement. Ne nous trompons pas, le Brian Jonestown Massacre est bel et bien le groupe de l’année, et ils le méritent largement.
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4. Locataires – Kim Ki Duk

Il me semble qu’avec La Vie Aquatique, c’est le film de cinéma de l’année. C’est-à-dire un film qui se sert de tous les moyens qui lui sont donnés sans s’appuyer uniquement sur un scénario. L’histoire est simple, j’en ai même piqué le reliquat de départ pour un personnage très secondaire du mon Manuel de Cristallographie : un jeune homme coréen passe toute sa vie dans les maisons des autres. Le matin, il repère celles qui semblent vides et le soir il s’y introduit pour y passer la nuit et vivre dans la vie des gens sans rien voler d’autres que le contenu du frigo nécessaire à son repas. A ce titre, la première demi-heure du film est admirable : on le suit dans sa vie de tous les jours, sa solitude, ses errances, et la chaleur qui lui apporte des simples photographies ou des objets du quotidien. On a l’impression de toucher là à la véritable essence du vagabond, on pense à Dylan, Kerouac et même à Doherty par moment. En prime, il leur repart toujours une des choses que la vie moderne et ses horaires nous empêche de faire immédiatement. Et un jour, le jeune coréen voit revenir les propriétaires de la maison dans laquelle il s’est introduite et assiste à la scène d’un mari, riche entrepreneur, battre sa femme. Au lieu de s’enfuir comme il l’avait initialement prévu, il va la secourir, laisse le mari pour mort, et s’enfuit avec la jeune femme. C’est la deuxième partie du film qui commence. N’importe qui en aurait fait un road movie plein de personnages folklorique. Kim Ki Duk en fait la fusion de deux êtres dans leur dissolution. Ils ne se parlent jamais. A peine une dizaine de phrases doivent être prononcées durant le film. Le jeune coréen accepte la jeune femme dans sa vie de tous les jours et ils continuent tous les deux à vivre la même movie, comme un négatif des couples à qui appartiennent vraiment les maisons, comme leurs ombres, vides des faux sens que nous ayons de nous donner pour exister, paroles, travail, argent, sexe, problèmes, vides et presque morts, vides et plus que vivants. Ils deviennent des fantômes qui par leur présence questionne la vie des absents, les êtres vivants, et l’on sent bien qu’au lendemain matin, quand il s’en vont, les maisons n’ont plus rien de ce qu’elles étaient, quelques choses à changer, elles sont en vies et quand leurs propriétaires reviendront, ils le sentiront en eux, ils sentiront des questions, ils sentiront l’empreinte du couple en fuite, partout et nulle part, et si rien ne change, ils auront connu un jour ou deux la chaleur résiduelle de leur non-vie, réchauffant toute la glace dont nous pouvons recouvrir le monde. Et puis, dans la troisième partie du film, le mari encore vivant et bien remis retrouve sa femme, mets le jeune coréen en prison. Privés l’un de l’autre, ils continuent de vivre dans leur monde de silence mais perde leur chaleur. En prison, le corps du jeune homme continue de se dissoudre, de plus en plus, jusqu’à toucher à l’inexistence. C’est ainsi qu’il arrive à s’enfuir et à rejoindre la maison de la jeune femme. Il s’est bien que s’il la retrouve, ils continueront leur vie d’errances, âmes sans attache, âmes sans vie, juste de la chaleur. Alors il décide de rester dans l’ombre du mari de la jeune femme. Derrière lui, il touche un peu à la vie, celle qu’il a du écouter pour être libre, pour n’être plus que l’âme d’un homme, libéré de toute pression du corps, mais de toutes ces possibilités également. Il finit ainsi, ombre libératrice, esprit malin asiatique qui fait rire, comme elle ne l’a jamais fait, la jeune femme quand son mari à le dos tourné, parce qu’il a compris que la vie est froide et que la mort n’offre rien, il s’allie à son pire ennemi, le corps, dans ses absences, dans les moments où il ne peut être là, le sommeil et l’inattention, tout ces moments où l’âme, l’esprit prend le contrôle en chacun de nous. Ces interstices de vie dans notre simple présence de roc, d’objet indifférenciable des autres, maison comme toutes les maisons, si inutile quand il n’y a personne pour l’occuper, quand c’est l’heure pour elle de devenir ce couple en fuite, quand c’est l’heure pour elle de vivre.

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My Year of Love (partie 1) 

Titre assez ironique étant donné l’année que ça a été pour moi, le cinéma, et la musique.



Les meilleurs films de l’année 2005 :
9. Last Days – Gus Van Sant


La déception de l’année. Pourtant, vu le niveau de l’année 2005, il mérite une place dans le top. Déception pour pas grand chose d’ailleurs, simplement parce qu’après Elephant et à moindre dose Gerry, on attendait ce film avec impatience. Or il se contente d’adapter au thème traité le système des précédents. Un peu comme du mauvais Lars Von Trier. A cela, qui ne serait finalement pas si grave, il faut rajouter tout de même le défaut principal du film : il n’y a pas de scénario. Elephant avait un scénario au sens d’histoire, de vie, c’était l’histoire de jeunes adolescents qui se font tuer par eux-mêmes. Gerry, c’était deux frères qui se perdent dans le désert. Là, c’est une rock-star qui meurt. Ce n’est pas un scénario, c’est un acte. C’est quinze secondes. Et une heure et demi de mort, de vie, d’errance symbolique. Mais si on sent que quelque chose cloche, c’est que Van Sant n’arrive pas totalement à remplir cet temps, quoi qu’il y mette. Alors bien sûr, Michael Pitt est très bon, il l’est toujours en général. Mais le film à un défaut : il n’y a pas de personnages. Elephant avait John, Eli, Gerry avait les deux frangins. A la rigueur, Blake, bon, sa seule caractérisation, c’est quand il joue de la musique, et ça lui suffit. Les personnages secondaires par contre… Ils sont inexistants, s’il n’y avait pas le petit gimmick de guitare de Lukas Haas à la fin et Venus in Furs du VU, on pourrait vraiment se demander à quoi ils servent : autant les enlever non, si c’est pour qu’ils n’existent pas ? Oui , je comprends que c’est du cinéma pour le cinéma, que ça touche même à la beauté parfois et qu’on en sort indéniablement marqué. Je peux même concéder qu’entre Last Days et Walk The Line, Last Days est, en principe, préférable. Mais, parce qu’il y a un mais, le défaut de Last Days est qu’il cumule les déceptions : il n’y a pas de scénario + la musique est bonne mais rare + les personnages secondaires sont oubliables + le montage n’a rien de spécial et se perd en réutilisant des vieux principes= un peu trop de choses qui l’empêchent vraiment de fonctionner. Dommage, un seul de ces éléments aurait fonctionné au maximum, le film aurait été incontournable.

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8. Moi, toi et tous les autres – Miranda July



Je le mets huitième pour la conviction de Miranda July dont c’est l’esprit finalement qui est le scénario, les acteurs et la réalisation. Elle est mignonne, drôle, pathétique. Que demander de plus ? Oui, plus de consistance, pour sûr, plus d’idées de réalisation aussi. Mais il y a tellement de petits clins d’œil, sans cesse, qui reviennent. Les scènes ne sont pas hilarantes mais marchent sur la longueur : plus on s’attache aux personnages, plus on rit, plus on intrigué, plus on s’identifie, plus on attend des choses et plus on en est récompensé. Si seulement la fin ne venait pas si vite. Si seulement le film ne s’arrêtait pas à simplement être démonstratif. Miranda July cherche à questionner l’âme, y échoue et n’arrive qu’à la montrer, ce qui est déjà pas mal. C’est peut-être là le défaut du film : il échoue dans son questionnement, et les produits de cet échec sont ce qu’il y a de mieux dans le film. Ce serait sans aucun doute une série extraordinaire sur le format des américain, un mélange parfait entre la forme des Sopranos et le fond de Six Feet Under. On ne pourrait qu’encourager, à genou, une initiative pareille d’un network américain comme HBO ou Showtime. Ça ne semble évidemment pas dans les cartons et il est presque trop tard. On hérite d’un film moyen, plutôt sympa. Il aurait fallu couper au moins la dernière demi-heure, sortir l’heure restante en tant que pilote et éviter de résoudre par la facilité la petite dizaine de complexes narratifs, fils emmêlés de vague à l’âme, d’interrogation existentiels et de folie. Allez, quelqu’un a bien du commencer une pétition quelque part, pour demander qu’une série soit faites de Moi, toi et tous les autres. Quel meilleur titre que celui-ci pour une série qui voudrait questionner l’âme d’un petit quartier comme un exemple de l’humanité ? Quelle plus grande joie que de retrouver Miranda July toutes les semaines ? Le problème de Moi, toi et tous les autres, c’est que c’est un film qui adapterait Six Feet Under au cinéma. Mais Six Feet Under, c’est une série et ça ne marche que comme ça.

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7. Mysterious skin _ Greg Arakki



Typiquement, le genre de film dont la bande annonce est cent fois mieux que le film. D’ailleurs, à remarquer, le niveau des bandes annonces est très élevé cette année : garden state, sa musique et son montage mystérieux ;match point, bel opéra rappelant Beethoven au clavecin, révélation des personnages très charnels, voix off dans le meilleur esprit allen ; la vie aquatique et ceremony de new order ; last days qui réussit bien en une minute que le film lui-même en une heure trente, … Mysterious Skyn lui, a une bande annonce surréaliste, à la limite de la science fiction. L’histoire d’un jeune garçon qui a été enlevé par des extra-terrestre dans son enfance et cherche à retrouver un autre garçon enlevé en même temps que lui pour comprendre enfin la vérité, alors qu’au fil des images, nous comprenons que quelque chose de beaucoup plus sale ce cache là-dessous, dans les non-dits. Araki auraient du jouer de ça, de l’imagination d’un enfant, des non-dits, de l’inconscient. Au lieu de ça, il rentre très vite dans la chronique homo trash vue et revue qui vire vers la pédophilie, relativement inédite. L’enlèvement d’extraterrestre n’est qu’un prétexte, une bonne idée, vite évacuée dans l’esprit du spectateur. Araki ne sait peut-être pas que ce sont les prétextes qui durent le plus, que ce sont en eux que nous croyons le plus, et que c’est par le montage, le doute, qu’il aurait pu doucement révéler la terrible vérité comme elle se révèle au jeune garçon blond (oui j’ai oublié le nom, d’accord). Là, on oscille entre science-fiction et chronique trash, l'un détruisant l’autre, parce que la focalisation ne se fait pas sur un des deux personnages. Le garçon brun aurait du rester un personnage secondaire, mais son acteur, de par sa réputation ou son travail, occupe trop l’écran. Le film est tout de même 7ème parce qu’il crée une ambiance, que sa bande son contient du shoegazing, et même du shoegazing qui reprend Syd Barrett. Mais bon, encore une fois, et c’est la tonalité de 2005, un film en demi-teinte.

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...à suivre dans la soirée...
 
Tuesday, February 21, 2006
 

Paul (McCartney) est mort 

L’un dans l’autre, trois parties, désarticulées. Une fois encore, j’étais dans un bus. Quelle putain de signification cela peut-il avoir ? Voyons : des années plus tôt, c’est dans un bus que j’ai pour la première fois pris conscience de l’existence de la perfide Céline et de son intérêt pour moi ; c’est en bus que je vais me rendre au travail ; Nate Fisher symbolise la mort de son père en le voyant partir dans un bus (Six Feet Under). Il doit y avoir encore d’autres significations. Quoi qu’il en soit, ce bus m’étaient des HEURES à faire un trajet qui prenait normalement une quinzaine de minutes. Chose drôle, dans ce bus, il y avait beaucoup de monde de ma connaissance, amis ou ennemis, souvenirs scolaires, dont la perfide Céline. Après un bon bout de temps et complètement exaspéré, je faisais ouvrir les portes du bus et descendant au milieu du trafic, dans une ruelle juste en face de mon ancien appartement qui n’était pourtant pas ma destination, suivi par tous les passagers du bus que je connaissais, et nous rentrons dans un immeuble à étage unique, sorte de hangar ou de magasin vide. Ok, ça se complique. Il se trouve que c’est la maison rectangulaire dans laquelle je me trouvais hier. Le groupe se disperse, moi je vais aux vestiaires et passe mon temps à saluer la foule compact qui s’agglutine autour de moi, gens du bus et autres personnes bien plus sympathiques. Nous buvons, rions, jouons de la musique, toutes guitares dehors, torses nues. Peut-être bien que le seul à avoir gardé sa chemise, c’est Paul McCartney.




Pourtant, l’atmosphère est étouffante et nos sueurs créent de la buée. Je joue quelques morceaux avec Paul, l’un en face de l’autre, puis je vais de son côté, nous discutons de nombreuses minutes, glissant nos paroles dans nos oreilles pour passer par-dessus le brouhaha ambiant. J’entends qu’on m’appelle dans la pièce à côté mais ni prends pas grande attention. Une fille de ma connaissance nous interrompt, elle fait partie des bons, est très jolie et plutôt sympa mais que dire ? Je parlais avec McCartney, j’avais donc d’autres priorités. Pourquoi Paulo plutôt que John ? Musicalement je serai plus Lennon, c’est sûr mais quelque chose dans le visage de Paulo m’inspire la sympathie. On continue de m’appeler de l’autre côté et je sais que je n’ai plus le choix. McCartney veut rester dans les vestiaires mais avant de me laisser partir il me dit une simple chose : « tu es des nôtres », comme s’il me laissait rentrer dans ce petit cercle fermé, comme si les nôtres comme ils les appellent existaient encore, il m’invente à en faire parti, aucune symbolique dans la façon qu’il a de le dire, non, c’est une simple invitation, un carton d’invitation, informel et sans obligation de réponse. Pour cette scène, le directeur photo a choisi de tourner avec un filtre jaune qui fait tout ressembler à la couverture de ce livre sur Peter :


Dans la pièce d’à côté, tout un décor pour une séance photo a été installé. Des filles torses nues courent dans tous les sens. Je suis le centre de la séance photo, ça je le sais plus ou moins, ou en tout cas je m’en doute, et cela me fait prendre conscience petit à petit que les filles ne courent pas dans tous les sens, elles courent autour de moi, semblables à des Bodicée indiennes qui auraient capturé un cowboy romain. Je ne reconnais pas vraiment ces filles, ou alors celles que je reconnais vaguement m’importent peu. La séance photo est vite achevée, en réalité elle dure à peine le temps qu’il me fallut par analyser la scène et comprendre ce que m’arrivait. Le photographe, sympa, me jette mon pull pour que je me rhabille et ne prenne pas froid. Pour les filles, pas de bonnes intentions et elles n’ont pas l’air de s’en offusquer. Alors que j’allais sortir, je me rends compte qu’elle était là tous le long. La perfide Céline. Nue, joyeuse et splendide. Elle remarque que je l’ai vu et s’approche de moi, comme si elle ne m’avait jamais connu autrement que dans cette seule et unique séance photo. Un train plein de filles est déjà reparti vers les vestiaires. La pièce est désormais dégagé et je respire à nouveau. Céline me tiens les épaules, sans signe de rancœur ou de sentiment. Nous sommes simplement deux personnes qui viennent d’être pris en photo et qui font connaissance et j’aime énormément ça. Puis elle voit le pull que je porte et me dit : « Tu le portes encore celui-là ? On s’est connu deux semaines il y a deux ans et tu le portes encore. Il est encore plus horrible qu’avant ». Et je regarde ce pull et je vois qu’il est effectivement dégueulasse. C’est la première chose qui me frappe. Il est plein de poussière, cette même poussière qui s’élève de la terre des Eurockéennes, quand il n’a pas plut du week end et que les jeunes gens se mettent à sauter en l’air au son d’Interpol. Il y a même plein de trous, verticaux, partant de mes épaules et descendant jusqu’à la moitié de mon torse, comme des griffures. C’est une métaphore de ma relation avec Céline sans doute, des cicatrices assez moches que j’aime à oublier en les portant une ou deux fois par semaines. C’est seulement après avoir constaté la saleté que je me rends compte de ce que sa phrase signifie : il y aura toujours un passé.



La dernière partie se situe je suppose entre 1 et 10 ans plus tard. Je suis dans la jungle, avec mon équipe, et la fille qui est avec nous me rappelle étrangement Céline. J’aurai du le savoir quand je l’ai embauché. Nous devons vacciner des animaux qui dégénère et deviennent dangereux. Pour l’instant, ce sont les gorilles qui sont touchés. Nous avons lancés des gaz endormants et balancé un peu à l’aveuglette une bonne centaine de flèches étourdissantes. Il faut ce qu’il faut, on a donné les moyens. A la hauteur d’un pont de bois qui passe par-dessus un minuscule filet d’eau, nous apercevons le corps d’un bébé gorille endormis qui nous tourne le dos. Prudemment, nous restons à l’extérieur des cinq mètres de sécurité. Le gorille a la tête cachée entre les jambes, ses membres pendent pathétiquement et son dos est courbé à l’extrême. Un de mes gars tire une fléchette de vaccin qui atterrit accidentellement dans l’anus proéminent du gorille. Immédiatement, je rajoute deux mètres au périmètre de sécurité. Le gorille bouge, sans doute tiré de l’oubli par le choc. Et c’est alors que quelque chose d’horrible se produit. Les poils du gorille nous paraissent soudain anormaux, il se redresse mais au lieu de s’arrêter, fait un tour sur lui-même à 180°, ses membres s’animent soudain à l’envers de ce que nous pensions, sur son dos se révèlent deux yeux effrayants et ce que nous pensions être son anus se révèlent enfin être sa bouche. Une araignée. Une araignée de plus d’un mètre de long. C’est ce que je me dis au moment où tout s’effondre autour de nous, les arbres, la végétation, le pont et j’ai le temps de voir l’araignée transformer toute mon équipe en bouillie, avant qu’elle ne s’approche vers moi et s’écroule contre l’arbre qui m’est tombé dessus, tuée par le vaccin, ses pattes touchant mon visage.
 
Monday, February 20, 2006
 

Winning Days 

Plus j’y pense, plus j’en viens à être persuadé que les années de 2002 jusqu’à 2004 étaient des exception, un eldorado, nos années 60 à nous et que nous sommes les seuls à nous en être rendu compte.


A cette époque, un nouveau groupe sortait un disque d’enfer tous les mois, voire plus. Tous ne resteront pas, mais une bonne poignée le fera et chaque son semblait frais, revigorant, chaque chanson sonnait comme la bande original d’un monde à elle seule. A citer : The Libertines, Kings of Leon, Interpol, Sondre Lerche, Girls in Hawaii, The Kills, Hot Hot Heat, Adam Green, Postal Service, Polyphonic Spree, The Rapture, Ben Kweller, The Datsuns, Babyshambles Sessions, The Vines, …
A cette époque, on pouvait, une fois par semaine, voir ou revoir un film exceptionnel et grand public dans une salle de cinéma d’art d’essai. Les thèmes étaient variés, les images bouleversantes et les ouvrages étaient parfait de bout en bout. A citer : Elephant, Adaptation, Ken Park, Elephant, Lost In Translation, Kill Bill, The Dreamers, Memories of Murder, Turning Gate, Anything Else, Carnets de Voyage, 2046, Old Boy, Eternal Sunshine…



Aujourd’hui, plus rien, et même ceux révélés par l’époque échouent, répétitifs, perdus ou vendus : Strokes, Kills, Datsuns, Van Sant,… Le temps est au pastiche, à l’usurpation d’identité, l’époque est à la prétention et aux erreurs, pourtant si flagrantes, qu’il suffirait de gommer.
L’histoire est finie, l’époque est close. Nous y reviendrons, plus vite que prévu, à force d’années de vaches maigres, il vaudrait même mieux que le monde entier l’ignore, mais pour nous, ce sera cette période là, et une ou deux autres, que nous essaieront de rappeler avec nos rêves et nos cauchemars.


Petit souvenir sous cloche, remuer pour voir la neige tomber :
La chose qui me travaille peut-être le plus inconsciemment dans tout ce que je me rappelle de mon voyage à Paris, c’est une simple image aperçue une fois ou deux rues des martyrs. Il y avait ce bâtiment un peu plus grand que les autres, vieux d’un siècle, un peu plus, un peu moins, peut-être était-ce la face arrière d’un bâtiment de la rue Lafayette. Au dernier étage, il n’y avait pas d’appartement. C’était presque dans les toits. Il y avait simplement de très vieilles vitres de plusieurs mètres de large, jaunies par la saleté et rendu presque opaque par le temps. A travers elle, on n’apercevait comme des chiffons de toutes les couleurs. Au bout de quelques secondes d’attention se détachaient les silhouettes et les visages de personnages de carnaval, grandes marionnettes de papier mâché anéanties doucement par le temps.

J’ignore vraiment pourquoi elles m’ont tant marqué. Mais m’en rendre compte me fait déjà mieux respirer. Peut-être pourront-elles faire partie de l’histoire finale de Nos Nuits Ardentes.

J’ai encore une chose à confesser. Depuis quelques jours, je me sens mieux. Depuis que je me consacre au moins une fois par jour à Beg / Steal / Borrow. J’ai presque l’impression de me retrouver à l’été 2003, alors que tout était possible, que l’avenir existait encore, que les Babyshambles Sessions étaient encore neuves. J’ai à nouveau des idées pour Nos Nuits Ardentes, j’ai à nouveau envie de l’écrire, de l’écrire tout court, j’ai l’impression que ces vacances ne s’arrêteront jamais, ces quatre derniers jours sont passés plus doucement que toute l’année 2005, quand bien même il ne reste qu’une simple semaine, j’ai même foi en les jours qui suivront, j’ai même la prétention d’affirmer que je survivrai. Ou bien j’irai à Jackson.


Je crois qu’à un moment donné, j’étais Sacha, le personnage de Nos Nuits Ardentes. Et je me suis plus ou moins réveillé en sachant qu’il devait mourir. En fait, il y avait deux parties, peut-être sur plusieurs jours. Dans la deuxième, je/Sacha pouvait sauter comme je le faisais plus jeune, à l’époque où l’espoir existait encore, et rester à flotter dans l’air pendant plusieurs secondes, une minute même, tout en avançant. J’effrayais le gens ou les regardait m’applaudir dans une rue qui s’appelle la rue du Sauvage. Là, j’avais un appartement au-dessus d’un magasin, dans les combles, et j’y entrai par la fenêtre en sautant et en flottant. J’étais heureux de mes habilités, mais en même temps, je sentais que quelque chose clochait. Une fille venait me prévenir de cela. Je finissais à la cave, presque agonisant, attiré par une sorte de ruche gluante accroché au plafond. J’ai à deux endroits en même temps. Dans la cave et dans un bar. Dans ce bar, je voyais des gens en noirs tentant de tuer tous les consommateurs. Je savais que ces hommes en noir était comme moi. Je savais que je devais m’abandonner à la ruche pour disparaître de la cave et sauver ces gens dans le bar. Une fois entièrement là-bas, j’exécutais les hommes en noir, à mains nus. Je savais qu’ils étaient comme moi et que plus j’utiliserai mes pouvoirs, plus de mondes deviendrait comme les hommes en noir, avec des variantes de mes pouvoirs. J’étais le début de la dérive, et le seul qui pouvait l’arrêter. C’était un mélange de tous les films de Cronenberg, influencé par un visionnage de La Mouche en état de trop grande ébriété. Dans la première partie, beaucoup plus classique, j’étais dans une maison étrange, tout en longueur. Il y avait même des vestiaires. Dans une pièce, c’était le Nouvel An, avec bon nombre de mes connaissances, amis ou non. Il y avait une fille qui m’aimait dans cette pièce, c’était Gwenaëlle, la copine de Sacha. Elle était blonde je crois. Des cheveux plutôt bouclés. Je passais simplement la tête dans cette pièce et retournait aux vestiaires. Sans que je lui demande vraiment, elle me rejoignait et nous y faisions l’amour. Après, elle retournait au Nouvel An, moi je sortais, avec l’irrépressible besoin de m’enfuir. Je prenais d’abord un bus de nuit, y resta pendant plus d’une demi heure avant de me rendre compte qu’il m’emmenait à l’opposé de ma destination. Je demandais au chauffeur d’arrêter et il me laissa au milieu de nulle part, avec un chemin à travers les champs pour seule route. Je marchais, marchais et savais que ce chemin me ramenait vers l’étrange maison. Après tout, je n’avais qu’à la dépasser et continuer mon chemin. Venant dans ma direction, je croisais un homme, petit mais fort, aux cheveux gris, qui me proposait de m’aider à retrouver ma route. Je compris que c’était le père de Gwenaëlle seulement quand je la vis courir à notre rencontre, affolée. C’est là qu’il me frappa et sans doute me tua. C’est là que je compris que Sacha devait mourir.
 
 

Marche droit, pour voir ce que ça fait 

Peut-on arrêter de marmonner, de se plaindre un instant, de poser de question ? Considérons donc ce point d’interrogation comme barré.



Walk The Line - James Mangold

D’abord : ce n’est pas du cinéma [cinéma, du mot cinématographique, par dérivé langage cinématographique, cf le site de Daniel Weyl dans mes liens pour une explication de ce concept plus que primordial). Nous sommes au niveau 0 du cinéma. Plus que 0 même. Toutefois à choisir, n’est-ce pas, il vaut mieux voir ça que Sheitan ou Munich dans nos complexes cinématographiques ou des films contemporains turcs ou allemands dans nos salles d’art et d’essai. Parce que, s’il a beau être le niveau 0 du cinéma comme les autres, Walk The Line à quelques qualités et autres avantages à mettre en avant. Déjà, la musique. Sans commentaire autre que ça, la musique, jouée, interprétée, sous-titrée pour ceux qui ont du mal avec l’anglais et les autres, et soulignée. Ça se suffirait à elle-même. Ensuite, Johnny Cash, sa vie, son personnage, son histoire, sa femme. Enfin, des acteurs tous impeccables, jusqu’au moindre petit second rôle, à commencer par Joaquim Phoenix et Reese Whiterspoon, jolie, simple en brune, presque aimable. Voilà, rien que pour ces trois choses, on est, avec un tout petit peu de sens, forcé de choisir ce film-là parmi tous les films à l’écran ces dernières et prochaines semaines. La plus forte approximation pour qualifier ce film serait peut-être le terme de pochette. C’est une pochette, énorme, animée, en couleur, avec des photos, des paroles, des voix, des discours, des dialogues, une histoire. Pour un tiers du prix d’un cd, on peut avoir cette pochette. C’est plutôt pas mal. Nous étions 16 dans la salle, un vendredi soir, pendant les vacances. Autant dire que la nullité, la débilité, l’ingratitude, et tout simplement, le vide, domine cette bonne vieille terre.
Alors évidemment, c’est un très mauvais film, malgré que ce soit le meilleur du mois. On croirait voir une photocopie couleur du biopic Ray de l’année dernière. Même photo, même façon d’articuler l’histoire, même pauvret fil conducteur du frère décédé et de la drogue comme s’ils étaient liés, mains dans mais, bras après bras. C’est téléphoné, mais on échappe à une morale dictée à haute voix, ou toute autre dictature de facilité de scénario. Pour le reste, c’est pas vraiment mieux, peu d’idée dans la réalisation, aucune dans le montage, pas vraiment d’image plus belle que d’autres, de cadres mieux composés. On reste dans une bête trame qui se déroule sous la conduite d’un guide d’écriture de scénario à 20 euros en commande à la FNAC. C’est dommage il y avait peut-être deux ou trois choses à en tirer quand même. Il y avait moyen de faire un très grand film, un film qui tiendrait les années, qui en montrerait aux petits jeunes. Eh bien non. Ce n’est pas un film qu’on acheterait en dvd. C’est un film qu’on se ferait offrir. C’est un film qu’on trouverait, dans un boitier de cd, par-dessus un Greatest Hits, contre la face avant, coincé sous ses drôles de petits rivets de plastiques, mais si, vous savez…



Allez, dans un post précédent, je parlais de liberté, bla bla, personne ne lisait de toute façon, bla bla bla. Un petit poème donc, composé à la sortie du film (dans ce même post, je parlais aussi d’art minable, hein, alors chut).

Ici gît Johnny,
Joueur de mots, joueur de balles,
Sous cette pierre
En rectangle de robe noire
d’où jamais on ne revient
C’est bien lui,
Le dresseur de cordes,
Etouffé au pied d’un arbre,
Depuis quand n’est-il plus que d’os,
Des années oh des années
Depuis quand voit-on sa chair tendre
Au clair de lune sur la pierre danser ,
Tant d’années oh tant d’années
Et ses cheveux au vent s’envoler,
Pour une simple chanson de voix perdue.

Par delà, les gimmicks, les siens et les miens, le film m’a donné un peu de ce vieux sentiment, la confiance, en toutes ces choses, l’avenir, le monde, les gens, et pour ça, seulement ça, il mérite les flammes.

 
Saturday, February 18, 2006
 

Les Rêveurs 

Où en suis-je aujourd’hui ? Alors comme ça je commence un nouveau blog ? Pourquoi faire ? Un nouveau blog que personne ne lira, une nouvelle suite de mots trop vites écrits, de films mal vus, chronique de souvenirs qui n’en sont pas encore, toutes ces choses que moi seul lit, des mois plus tard, en regrettant ce temps qui pourtant ne change jamais, coule, indivisible, un et un seul, le temps de ma quête contre le temps. Faire semblant que je ne suis pas sur la route de l’oubli. Que chaque pas, chaque jour qui passe, chaque seconde qui s’écoule, ne m’amène pas vers la destruction, l’annihilation de ces mots de peu de sens, la fin de tous les rêves qu’ils semblent engendrer, rêves d’un futur, rêves d’un passé, rêve d’un présent, qui n’ont jamais été que des bribes de réalité, des possibilités impossibles si proches mais séparés de moi par une plaque de verre. Je sais que jamais ces mots n’entreront dans le sens de l’histoire, je sais que jamais ils ne seront publiés, jamais ils ne serviront à ma publication, que jamais ils ne seront lus par quelqu’un d’autre que moi et une poignée éventuelle d’inconnus qui se sont trompés de chemin. Pourquoi les écrire alors ? L’art pour l’art. L’art minable pour l’art minable. Le minable pour le minable. Minable pour minable, autant continuer, si on est en capable. Tant que je le serai, je continuerai. Nos estimations de durée de vie pour ce blog vont d’un mois à la vie entière. Pourquoi ne pas tenter. Rappelle-toi ce que tu as perdu à Paris, c’était bien non ? L’espoir.
A un moment, ne faut-il pas perdre tout espoir ? A l’âge adulte, à celui où les routes se ferment, où il n’en reste plus qu’une, toute tracée, ne faut-il pas perdre l’espoir ? Ce n’est que mimes et mensonges dessinés par une main cruelle pour te faire accepter la pilule, tu le sais bien.
Sauf que si vous me connaissez comme je me connais (à qui parlé-je), vous savez que l’espoir, je ne connais que ça, c’est dans mon génome.
Sans espoir, je suis libre de faire ce que je veux. Tout. La poésie libre. L’art libre. Cela commence demain.

…Eh bien je dois avouer que j’ai du mal avec ça. Ma seule liberté, la seule que je prends, c’est celle de me mettre à nu sur internet. Comme si j’enlevais mon futal dans une ruelle très sombre, un petit cul de sac, au beau milieu d’une zone industrielle, derrière une usine désaffectée, à 3h20 du matin, le 15 août, le lendemain d’une attaque nucléaire, derrière un carton. On ne sait jamais, une chance sur mille que quelqu’un vienne dans cette ruelle à ce moment précis. 1 chance sur un milliard que ce soit une jolie fille qui rit en me voyant, se retourne pour me laisser le temps de me rhabiller et qui se mettent à me parler. Je tente le coup ? Est-ce que je vais dans cette ruelle, est-ce que je baisse mon futal ? Combien de temps dois-je attendre ? Est-ce que je tente le coup ?


Meilleurs albums de 2005 :

1. Babyshambles – Down In Albion

Que dire ? Se reporter au post « Pourquoi Down In Albion est une tragédie » dans tahitirainsong.blogspot.com pour le sens de l’album et cette dernière partie depuis What Katy Did Next est formidable (d’ailleurs, c’est la première chanson que j’ai entendu de l’album, un soir de novembre, sur internet, frileux, glacé, le souffle court, puis réchauffé, le sourire au lèvre, avec Geoff). Un album long, donc un album à s’approprier, sur lequel il faut choisir ces chansons, des moments d’anthologie, des moments très nuls, une poignées de petits singles (Fuck Forever, A Rebours, 32nd of December, Pipedown) qui font plaisir et dépassent allègrement la moyenne des Libertines (la moyenne hein, pas le meilleur), un style très différent de tout ce qui a été fait avant. Une année normale, il ne serait pas devant, mais l’année est assez faible, il n’y a pas eu de Blonde Redhead, Sondre Lerche, Postal Service, Adam Green période « Friends Of Mine », Girls In Hawaïï , …
2. The National – Alligator

Vus live. Vraiment bien, aucune chanson bouche trou, des paroles magnifiques, très littéraires, une voix envoûtée. Ne manque que l’énergie et la conviction sur toute la longueur de l’album.

3. Sophie Auster – Sophie Auster

Que dire ? Elle m’a réconcilié avec la gent féminine. Je suis tombé amoureux d’elle. Elle a annulé son concert à Strasbourg. Voix et âme incroyable dans les chansons alors qu’elle n’avait que 16 ans. Chansons adaptés de poésies tendances surréalistes par Paul Auster lui-même. On regrette simplement que le groupe derrière ne soit pas plus vivant. De toute façon, rien que pour être le gendre de Paul Auster, je pourrai dire que cet album est le meilleur de tous les temps.

4. Baxter Dury – Floorshow

Pas tant écouter que ça. Et pourtant il est quatrième, c’est dire sa qualité. Lui est peut-être l’inverse de tous les albums listés précédemment : il a une âme, incroyable, étrangère, tous le long de la petite demi-heure qu’il dure. Je ne sais pas d’où elle vient, elle ne me ressemble pas, elle ne ressemble à aucun lieu, aucune atmosphère que je n’ai jamais connu et pourtant en moi elle trace une carte inconnue aux odeurs de vieux ports anglais, de chambres dans la pénombre.

5. Grab that gun – The Organ

Et si les Smiths étaient des filles et avaient un clavier. Ils seraient The Organ. Pas besoin d’en rajouter, musique impeccable, pratiquement que des chansons excellentes qui s’enchaînent sans perdre haleine, mais bien sûr, pour l’originialité…

6. The new fellas – The Cribs

Avec The Cribs nous entrons dans la droite ligne des petits groupes rocks indés racés Strokes/Libertines. Les années d’avant, on aurait pu en trouver plein dans ce genre de listes, et plutôt dans les premières lignes. Cette année, le genre s’est terriblement essoufflé sous le coup de nouveaux albums bof bof ( Franz Ferdinand, Strokes,…) et de nouveaux groupes beurk beurk (Kaiser Chiefs, Arctic Monkeys, Hard Fi, …) qui se réclament de la nouvelle vague indés, possèdent de bons singles, se laissent écouter, mais n’ont rien derrière, s’oublient vite, et dégoûtent à la longue. La plupart paraissent sans conviction et font penser à des groupes de vieux briscards qui s’achètent des converses et rajoutent un « The » à leurs noms. Avec les Cribs, ce n’est pas pareil. On a affaire à un petit album sans prétention, sur lequel le groupe s’amuse, fait du bruit, prend des guitares acoustiques, chante mal et ravi les oreilles. Pas de prétention, des chansons rapides, un enregistrement sincère, un peu d’humour, du tempo. Bon disque.

7. A certain trigger – Maximo Park

Apply Some Pressure, sans être ma chanson préférée, m’a sauvé la vie l’année dernière. En plus, l’album est varié, le chanteur y croit dur comme fer, même s’il y a trop de bouches trous.

8. The Back Room – Editors

Au concours de sosie, ils gagnent. Un croisement entre les Chameleons et les Psy Furs qui fait penser à Interpol (qui eux rappelons-le, étaient un croisement entre Joy Division et Television). Malgré tout un telle recette quand elle est exécuté par des jeunes chefs très doués est toujours un classique agréable, facile à digérer, et goutteux.

9. Bang Bang Rock’n’roll – Art Brut

Dans le top parce que drôles, fous, référencés, et parce qu’ils ont composé la chanson de l’année, oubliée de tout les tops : Emily Kane.

10. Alternative to love – Brendan Benson

Bonne élève. Voix pas mal, chansons pas mal. Easy listening, même si c’est très mal mixé pour ce que c’est. Mérite de figurer dans un top, pour l’effort et la gentillesse.
 
Thursday, February 16, 2006
 

Beg / Steal / Borrow 

Je dois retrouver ma vie. Comme un drogué, comme un imbécile, comme un vieillard. Je supplierais, je volerais, j’emprunterais pour ça. Bien sûr, avant, je dois savoir où je l’ai perdu.

L’année dernière. Ça c’est sûr. Plutôt au début d’ailleurs. Et puis quand j’y pense, c’est étrange, parce que sans ma vie, j’ai tout de même écrit le Manuel de Cristallographie, soit ma meilleure œuvre à ce jour. L’aurai-je perdu tout de suite après, ou en l’écrivant ? Je pourrai dire que l’écrire m’a vidé, que le livre m’a emprunté ma vie et que c’est exactement pour ça que j’attends avec angoisse les réponses des éditeurs, parce que j’attends simplement qu’ils me rendent ma vie. C’est tentant, mais ce serait oublié quelque chose d’important : mes quatre mois de travail l’année dernière.

Forcément, même sans y penser, je sais que c’est bien ça la principale cause de la disparition de ma vie. Pourtant, j’ai vécu de belles choses, très importantes, pendant que je travaillais : aller à Strasbourg pour voir Garden State, cette soirée spéciale DIG ! où j’ai vu Camille Goemans, voir In The Mood For Love en plein air tout en dégustant un milk-shake fraise, aller à Paris, rencontrer Coco Rosie aux Eurockéennes, me baigner en plein orage. Essayons de trouver les différents moments où la carapace s’est brisé.
La soirée en janvier 05 où je me suis pris une si grosse cuite que je me suis retrouvé à chanter presque nu sur une scène. Pas terrible, pas spécialement gratifiant mais bon, ça peut encore aller. Précisément, ça m’a montré que même bourré, personne ne veut chanter Time For Heroes avec moi.


La pré-soirée où j’ai appris la note de mon mémoire et où je l’ai jeté par la fenêtre. Ma première prise de conscience que jamais, quoi que je fasse, n’importe quelles études, mon travail ne pourra être accepté par l’establishment.
A Strasbourg, après Garden State, quand j’ai volé une affiche de Chet Baker. Malgré tout, j’avais encore des principes.


La seule et unique fois où je vis Camille Goemans, comme d’habitude, rongé à vie par les remords et pourtant bien conscient que le personnage que j’en ai tiré est beaucoup plus intéressé qu’elle n’aurai jamais pu l’être, quels que soient ses efforts.

Là je confonds les bons et les mauvais souvenirs, non ? Disons que ce sont tous des pierres sur mon chemin, le chemin vers la destruction de l’adolescent qui est en moi. Ça ne me dérange pas plus que ça. Mais si c’est en lui qui réside mes facultés à écrire, rêver, être amoureux, qui y a t’il en l’autre ? L’adulte. L’argent, le travail, la fin qui justifie les moyens ? Plutôt crever. Bien que c’est ce que la société tout entière attend de moi comme elle l’attend de chacun d’entre nous. Peut-être que cet adulte est une coquille vide. Ça expliquerait pourquoi j’ai l’impression d’avoir de nouveau 14 ans et d’être un imbécile. Si c’est le cas, alors tant mieux. A moi d’attendre, attendre que cet esprit s’ouvre, soit prêt à recevoir tout ce que je veux conserver de l’adolescent et tout ce que je veux créer de toute pièce, pour lui. J’y mettrai aussi, allez, ne soyons pas vache, un peu de compétences dans le travail, juste de quoi acheter à manger, des cds, et me sentir à mon avantage.

Je dois quand même parler de deux événements, sans ordre chronologique.

Aux Eurockéennes, le premier soir, alors que j’avais déjà vu Coco Rosie et que j’avais enchaîné ma journée de travail avec ma journée de concert, je me suis senti extenué. Vraiment, à en dormir debout. Quoi de plus naturel, j’étais fatigué. Pour me retaper, je me suis payé une crêpe, j’en ai mangé deux bouchées et je l’ai jeté. Et là, je suis allé m’assoire dans la pénombre. Je ne sais pas ce qui c’est passé. J’en suis ressorti peut-être cinq minutes plus tard, en pleine forme. Je me suis réveillé. J’ai switché. Un clic, et ce n’était plus moi. Un déclic, et l’adolescent, vidé de ses forces, ne pouvait plus maintenir le contrôle de mon corps. L’adulte, tapi dans l’ombre, lui cédait sa place et se proposait de le relayer un peu. Depuis, il n’a jamais voulu céder sa place en retour, et toutes mes interrogations, mes désespoirs et mon ennui ne sont que les dommages collatéraux de la guerre qu’ils se font à l’intérieur de moi.


Et dans cette chasse à la recherche de ma vie, de mon âme, comment ne pas mentionner Paris. La première nuit, ok je l’admets, j’ai pété un plomb. Mais j’étais seul dans une grande ville, j’avais payé cela avec mes économies et je ne savais tout simplement pas quoi faire. Non c’est vrai, je ne connaissais pas le métro et j’étais déçu par la première vision de mon quartier, malgré Montmartre. Pourtant, les signes que j’étais au bon endroit ne manquait pas : croiser Devendra Banhart dans la rue, voir un épisode surréaliste de Lucky Luke où Woody Allen à la vedette, etc. Au fond, c’est vrai quand même : c’était décevant. Pourquoi ? Parce que c’est comme partout. Comme chez moi. Parce que les gens avaient les mêmes têtes, gros durs ou gens normaux. Parce que les filles ne me regardaient pas, parce que les poèmes ne me sautaient pas à l’esprit, parce qu’on ne me dressait pas de couronnes de lauriers, parce que rien n’était gratuit, parce que rien n’était extraordinairement beau, parce que rien n’était exceptionnel, parce que rien n’était magique au premier coup d’œil. Evidemment, j’ai appris à apprivoiser ces sentiments et à voir qu’ils étaient faux. Mais quand on dépense beaucoup d’argents en frais matériels (train, hôtel) de l’argent qu’on a passé des mois à économiser en y pensant, de l’argent qui nous à aider à tenir le coup pendant qu’on travaillait, qu’on voyait tous nos rêves s’évanouir, dévorés par la réalité, ses dents acérées, sa noirceur en expansion, on attend d’être sauvé, d’être arraché à la vie, entrer en Arcadie.



Oh Oh Oh Oh I left something in Paris… L’espoir, peut-être.


Je supplierais, je volerais, j’emprunterais …
 

Ceci est mon quatrième blog, mais ils font tous partie d'une même ligne, en constante évolution. J'essaie de le tenir à jour le plus régulièrement possible, ça peut aller de toutes les semaines à tous les jours et jusqu'à mi-mars 2006, ce sera sans doute tous les jours.
Je vous conseille particulièrement de regarder dans mes liens le Manuel de Cristallographie, c'est un roman que j'ai écrit sur un groupe de rock, les Narcisses, inspiré par les Libertines.

Je prends, triche Et ment, Perd mon âme aux cartes, Vend ce que j’ai vu, Prête ce que j’attends, Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien, Je mendie ce que je vole, Donne des inventions, Offre mes fantasmes, Echange mes envies, Tout ça pour trouver, Quelque chose dont personne ne voudra.
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N'hésitez pas à les consulter, ils sont pleins à craquer de films, de livres et de musiques.
de Aout 03 à à Décembre 03 (de Twin Peaks à Magnolia)
de Janvier 04 à Octobre 04 (de Lee Miller aux Lois de L'Attraction)
de Octobre 04 à Janvier 06 (de Brooklyn Boogie à Detective Bureau 2-3)
de Septembre 06 à Janvier 07 (de Unloveable à Heartbreak Beat)

Oeuvres Persos:
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Roman Rock : Manuel de Cristallographie


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